De Valls 1 à Valls 2, le mauvais spectacle de la rentrée


Je ne sais pas si Valls II en a pour longtemps avec une majorité pour le moins bancale, mais je suis certain d’au moins une chose, c’est que le Front national a encore marqué des points après le spectacle pathétique que viennent de nous offrir Arnaud Montebourg, Benoit Hamon et Aurélie Filippetti.
Et c’est d’autant plus navrant que ces trois là invoquent la montée du FN pour expliquer leur décision qui (trémolos) serait dictée par l’impérieuse nécessité de faire passer leur « idéaux » avant leur devoir de solidarité gouvernementale. (Filippetti, mais les deux autres ont évoqué des motivations semblables). Curieusement, aucun d’eux ne mentionne leur devoir vis-à-vis des Français qui sont en droit d’attendre des ministres qu’ils soient concentrés sur leur travail et leurs dossiers : citons le soutien à l’économie française (Montebourg venait d’annoncer des mesures lutte nécessaires contre les rentes de situation des professions réglementées), ou encore la rentrée scolaire qui concerne des millions de parents. De ce point de vue, on ne peut qu’adhérer au jugement sans appel de l’ancienne ministre ump Valérie Pecresse pour qui « un ministre de l’Education nationale davantage préoccupé par la rentrée politique que par la rentrée des classes, c’est une première ». En effet, à quoi Benoît Hamon s’attendait-il en paradant à Frangy, aux côtés de Montebourg, à dix jours de la rentrée ? Ce n’est pas soutenir une vision caporaliste d’un gouvernement que de noter que le timing était désastreux.
Quand à Montebourg, le plus brillant et inconstant de la bande (il a été successivement Fabiusien, chevènementiste, aubryste, hollandiste, vallsien et j’en passe), il nous informe qu’il entend prendre modèle sur Cincinnatus, cet empereur (ou dictateur) romain connu pour avoir (brièvement) quitté les affaires politiques pour se retirer sur ses terres et qui, nous dit wikipedia, fut considéré comme un modèle de vertu et d’humilité ( !) et se singularisait par son opposition systématique à la plèbe. On reste littéralement interdit par tant de suffisance.
Car que s’est-il donc passé depuis avril dernier, lorsque ces trois là avaient en toute connaissance de cause accepté de participer au gouvernement de Manuel Valls ? Celui-ci les avait-ils trompés sur la politique qu’il entendait mener ? Comment pouvaient-ils ignorer que Valls mettrait en œuvre ce que l’on a appelé « le virage  social démocrate »- en vérité social libéral- annoncé le 14 janvier par le président Hollande, c’est-à-dire la réorientation de la politique économique vers l’encouragement de l’investissement ?
En vérité Manuel Valls avait doté cette feuille de route d’un deuxième pied, si l’on peut dire, avec des annonces de baisses d’impôts et de charges pour les ménages modestes (certaines retoquées par le Conseil Constitutionnel), et par une volonté affichée de réorienter la politique européenne vers davantage de relance et un euro moins fort. Toutes choses que réclamait Montebourg mais qui peuvent difficilement se décréter à Paris.
Quand au danger du Front National, il était parfaitement connu depuis les municipales et faisait même partie des raisons qui conduisirent Hollande à se séparer de Jean Marc Ayrault et à choisir Valls à la tête d’un gouvernement de combat (dont les mauvaises langues auront beau jeu de dire qu’il organisa surtout le combat entre ses membres).
En réalité, ce qui est apparu très vite à Montebourg et Hamon, c’est que la nouvelle impulsion (qui était très certainement la bonne) mettrait trop de temps à produire ses fruits pour que le gouvernement (et donc eux-mêmes) en tire un bénéfice politique. Tant en ce qui concerne l’investissement des entreprises (seul réel facteur de croissance et d’emploi) qu’en terme de consommation : les gains de pouvoir d’achat sont souvent épargnés par absence de confiance et de lisibilité dans l’avenir. Et quand ils sont dépensés, par les plus modestes, c’est trop souvent pour acheter des produits importés.
Bref, il y avait tout lieu de penser que l’électorat de gauche, n’ayant pas constaté d’amélioration de ses conditions d’existence, sanctionnerait durement en 2017 un président et un gouvernement jugés seulement coupables d’avoir trahi ses promesses de campagne et mené une politique « libérale » favorable au patronat.
Ne voulant pas se retrouver comptables de cette politique engagée trop tard pour réussir, Montebourg et Hamon, suivis par Filippetti, décidèrent donc  de quitter le navire, en théâtralisant des désaccords qui n’étaient pas puisque, par exemple, il est acquis que le déficit (et la dette) continuera de se creuser.
Cruelle ironie, il annoncèrent leur décision le jour même où François Hollande, bravant une fois de plus les intempéries (décidément quelle poisse avec la météo), rendait hommage à ces quelques pêcheurs bretons de l’ile de Sein qui, dès juin1940, abandonnèrent tout derrière eux pour répondre immédiatement à l’appel d’un obscur général qui entendait poursuivre le combat contre l’occupant.
Le nouveau gouvernement Valls se passera donc de ces trois là. Il y gagnera en cohérence. Mais pourra-t-il durer deux ans et demi avec l’épée de Damoclès de la dissolution ? Trouvera-t-il dans les rangs de la droite et du centre des alliés d’appoint parmi des députés qui écouteraient davantage l’intérêt du pays plutôt que des calculs politiciens ? Le fait que la droite parlementaire ne soit absolument pas prête à gouverner peut l’inciter à accorder un répit au gouvernement Valls. Nous verrons bien. Nous ne tarderons pas non plus à voir qui, de Montebourg ou de Marine Le Pen tirera le plus de bénéfice politique de cette affligeante séquence.
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